Internet, le web 2, les réseaux sociaux, la mobilité: le meilleur des mondes ?
Depuis le milieu des années 90, nous sommes de plus en plus nombreux à « profiter » des apports de l’internet, des médias et des réseaux sociaux et il faut avouer que nous y trouvons de la valeur, de la pertinence, des idées, des amis, suffisamment en tout cas pour nous projeter avec délice dans le monde de demain : numérique !
Bien sur, nous ne sommes pas naïfs au point de voir dans cette évolution un point d’arrêt à certains dysfonctionnements que nous subissons, voire certaines réalités dont nous souffrons (sociaux, politiques ou économiques).
Pourtant, il faut bien reconnaître qu’en moins de 20 ans, l’ouverture de l’internet a suscité chez beaucoup d’entre nous des espoirs, des attentes et des envies nouvelles.
Mais la crise est là (au moins en Europe) et l’évolution est plus lente dans ses effets tels qu’on les espère, de là à se demander si nos « élites » ont bien compris les enjeux !
Bonne question, s’il en est et c’est Gilles Babinet [auteur de » L’Ere Numérique, un nouvel âge de la connaissance » (Editions Le Passeur)] qui dans une émission de France Info se demande quelle est la culture numérique de nos dirigeants et quelle est leur vision face à la révolution numérique.
Gilles Babinet « reproche » une vision basée sur des réflexes et des pratiques du siècle passé.
Le discours est pertinent et la vision de Gilles Babinet est très intéressante et elle ouvre un débat dans lequel Fabrice Epelboin et d’autres se sont engagés notamment sur les réseaux sociaux.
Et si nos dirigeants avaient bien compris le numérique, mais ne partageait pas notre vision et nos perspectives !
Autrement dit, l’élite politique, sociale, économique veut-elle s’accaparer le numérique ?
Il est en effet étonnant de constater que ces « élites qui ne comprennent pas grand chose au numérique » sont en train de mettre en oeuvre la plus grande opération de contrôle des individus depuis que l’humanité existe.
Face à nos envies de liberté, de développement individuel, de valorisation personnelle, les élites organisent la surveillance de nos échanges à des fins officielles de protection et de défense !
Nos élites ne voient-elles le monde numérique que comme une opportunité de « mise sur écoute » de chaque citoyen pour mieux combattre « le complot » ?
D’un point de vue économique, la tendance est similaire et que peut-on voir dans le « big data » si ce n’est , entre autres, une appropriation de nos informations pour une exploitation à des fins marchandes ?
Pourtant la différence est sensible si on accepte le fait que nous sommes les premiers à divulguer ces informations et que la plupart d’entre elles n’ont aucune (ou si peu) d’importance pour autant qu’elles soient vraies !
Par contre, nous pouvons être légitimement choqués par l’opacité dans laquelle ces opérations sont faites, un peu « à l’insu de notre plein gré » !
En effet, il y a eu les révélations d’Edouard Snwoden, le vote en France de la très contestée LPM (dont un fameux article) et les réactions dont celle de Jacques Attali :
L’article 20 de la nouvelle loi de programmation militaire vient de donner à l’administration tout pouvoir de traiter tout citoyen soupçonné d’un délit quelconque comme un terroriste, c’est-à-dire de pénétrer dans sa vie privée sans contrôle a priori d’un juge.
La tyrannie de la transparence, dont j’annonce le danger depuis longtemps, vient, pour la première fois, de trouver sa traduction dans une loi. Une loi française.
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que tout cela se fait sans notre accord, en pleine opacité et pour reprendre les termes de Jacques Attali à propos de la tyrannie de la transparence, on ne peut que regretter qu’elle ne serve que les intérêts des élites politiques, sociales, militaires et économiques.
On pourra toujours arguer que nous (vous, moi) sommes les principaux acteurs de ce « brigandage d’informations » et que nous sommes victimes de notre soif d’existence qui nous pousse à un « exhibitionnisme » plus ou moins assumé.
C’est probablement un peu vrai, mais à notre décharge et donc à la charge de ces élites, il faut mentionner l’absence de formation, d’accompagnement par les structures classiques ad-hoc (l’école !).
Je ne suis certainement pas le mieux informé mais il me semble que l’apprentissage du numérique dans les milieux scolaires est aujourd’hui plus proche de l’admiration devant un enfant maîtrisant un Ipad que de la mise en oeuvre d’une pédagogie et de programmes adaptés à la réalité du monde dans lequel il vit déjà : le monde numérique.
Le monde de demain, numérique, reste à construire et la divergence de perspectives entre les élites et nous est inquiétante :
liberté vs surveillance
échanges vs suspicion générale
ouverture vs protection
enrichissement vs contrôle
« open » vs réservé
etc.
Pourtant, il y a des raisons de rester optimiste (pas béat) car le monde numérique est également source de nombreuses difficultés pour tous ceux qui veulent s’en accaparer les bénéfices ou se l’approprier.
Dans le monde demain, les pratiques seront différentes, plus directes, plus pertinentes et plus « critiques » et je me plait à penser que, notamment, :
- la masse, la diversité et le volume des informations
- l’intelligence collective et la critique des contributions
- la rapidité des échanges
- l’instantanéité des réactions
- la diversité des contributeurs
- la richesse des idées
- l’ouverture des débats
nous permettront de mettre en oeuvre un compromis fort entre nos envies, nos désirs et nos exigences de protection et de transparence.
Gilles Babinet a raison quand il dit que les élites (en France, mais c’est certainement également le cas dans tout le monde occidental) raisonnent comme au siècle passé.
Il est patent aujourd’hui que ces élites n’ont surtout pas vu – pour le moment – dans la révolution numérique des outils, une évolution culturelle et sociétale !
Dommage!
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